lundi 24 juin 2013



LE 12e ARRONDISSEMENT EST-T- IL UNE TERRE CENTRISTE ?


La question mérite d’être posée même si elle paraît évidente pour certains. Il est pourtant utile de rétablir la vérité sur une idée qui a marqué les esprits mais qui relève plus de petits arrangements que d’une réalité avérée.




Pour y répondre, revenons un peu sur le passé. Comme toujours, l’histoire explique beaucoup de choses et permet aussi de nuancer voire de contredire les évidences les mieux ancrées dans la mémoire collective.

A Paris, la première élection des maires d’arrondissement eu lieu en mars 1983, c’est Paul PERNIN, député du Centre des démocrates sociaux qui fut choisi par les habitants du 12e arrondissement. 

A l’époque, une bataille politique d’envergure avait été engagée par les socialistes pour affaiblir Jacques Chirac, maire de Paris sortant, chef de l’opposition nationale. Cette bataille fût perdue par la gauche avec l’élection de 20 maires d’arrondissement appartenant tous à l’opposition.
  
Cette victoire permit de confirmer le pouvoir de Jacques CHIRAC sur la capitale et d’y installer une union des composantes politiques de la droite qui lui servirait pour conquérir plus tard Matignon puis l’Elysée.

Sept mairies devaient donc bénéficier à des représentants de l’UDF ou du CNI : le 2e à Alain Dumait, le 3e à Jacques Dominati, le 7e à Edouard Frédéric Dupont, le 12e à Paul Pernin, le  16e à Georges Mesmin, le 18e à Roger Chinaud, le 19e à Jacques Férond et le 20e à Didier Bariani.


Ce subtile équilibre a permis de forger une union de l’opposition derrière Jacques Chirac candidat de l’opposition à la présidentielle. Malheur à qui s’écartait de cette règle. Ce fût le cas de Pierre BAS, maire du 6è arrondissement, qui avait soutenu Raymond Barre aux élections présidentielles de 1988 et qui perdit son investiture à l’élection municipale suivante. C’est ainsi et c’est à ce prix que la majorité municipale a pu être préservée.


Mais revenons au 12e arrondissement. Deux personnalités politiques ont émergé, le Général de BENOUVILLE, fidèle compagnon de la Libération, proche collaborateur de Serge Dassault, et Paul Pernin.

Elles se sont partagé les rôles, le premier Député, le second Maire du 12e. L’union était sauve ! 

Pourtant, ce fut le début d’une longue querelle dont le sommet fût atteint en 1997 avec la candidature dissidente de Jean-Pierre Bechter, premier adjoint au maire du 12e soutenu  par Jean François Pernin, maire du 12e arrondissement contre Jean de Gaulle députeé sortant, petit fils du général de Gaulle.

En réalité ce conflit ouvert avait commencé au départ du Général de Bénouville de l’Assemblée nationale. Jean-Pierre  Bechter, fidèle lieutenant du général pensait légitimement pouvoir le remplacer et lui succéder à l’assemblée.

Malheureusement, ce ne fût pas le cas. Jacques Chirac, peu de temps avant l'élection, convoqua Jean-Pierre Bechter dans son bureau de l’Hôtel de Ville et lui demanda amicalement, le bras sur l’épaule et réveillant sa fibre corrézienne, de laisser sa place à Jean de Gaulle aux prochaines législatives. Il s’exécuta la mort dans l’âme et ce fût sans doute le début d’une longue querelle dont l’issue expliqua en grande partie la perte du 12e arrondissement en 2001.

Entre temps, les municipales de 1995 se préparaient avec le départ de Paul Pernin qui devait abandonner son siège de maire du 12e en raison de son âge au profit de son fils, Jean-François. 

La famille Pernin avait négocié avec Jacques Chirac cette succession filiale sacralisant  ainsi cette identité centriste de l’arrondissement.

Mais l’affaire n’était pas si simple. En effet, la majorité gaulliste qui garantissait le résultat des élections était au bord de l’apoplexie. Pourquoi laisser aux centristes une responsabilité qui ne s’appuyait sur aucune réalité locale et ne résultait que d’un accord avec la mairie centrale ?

La fragilité du candidat centriste était patente et sa légitimité était naturellement sujette à caution. Dès lors, ce fut un gaulliste qui fit campagne et tira la liste vers la victoire : Camille Cabana, préfet, ancien Secrétaire général de la ville de Paris. 

Des échanges parfois houleux durant la campagne restèrent dans les mémoires. Alors que l’on demandait en réunion publique qui serait le maire du 12e, une réponse fusa  : «on ne vous demande pas de voter pour un maire mais de voter pour une liste». La cause était entendue, la tête de liste, Camille Cabana, allait s’effacer au profit d’un autre, tapis dans l’ombre, Jean François Pernin, fils du maire sortant trop introverti et orateur médiocre pour mener une campagne électorale. Autre temps, autres moeurs ! C’était le prix à payer pour garantir un semblant de diversité politique.

Les militants gaullistes se sentirent à juste titre trahis. L’élection eu lieu, la droite l’emporta et le maire fut six jours plus tard : Jean-François Pernin.

Pour avoir imposé successivement deux élus sans légitimité locale : Jean de Gaulle comme député et Jean-François Pernin comme maire, Chirac avait semé les graines d’une guerre intestine qui annonçait une future défaite pour son camp dans le 12e arrondissement.

Jean Pierre Bechter n’en resterait pas là et n’eut de cesse de contester en permanence la légitimité de Jean de Gaulle en s’alliant suptilement à Jean François Pernin et en lui apportant son soutien et une reconnaissance légitime en qualité de premier adjoint au maire. 

Le point d’orgue fut atteint en 1997 avec les élections législatives. Jean Pierre Bechter (RPR) se présenta alors comme candidat contre le député sortant RPR avec l’appui du maire Jean François Pernin (UDF). Le résultat fut sans appel. La légitimité gaulliste s’est alors imposée avec l’élimination dès le premier tour des deux dissidents. Jean de Gaulle  fut élu mais la bataille laissa des traces.

En 2000, la campagne municipale se prépare et Jean de Gaulle envisage très sérieusement de présenter une liste. Juste retour des choses !

Cette fois-ci, les tractations ont eu lieu au sommet de l’Etat avec le Président Jacques Chirac. Les secrets de famille l’emportant sans doute sur les intérêts politiques locaux, le projet de de Gaulle est abandonné à peine deux mois avant le premier tour, mais pas les rancoeurs. 

De Gaulle sortira discrètement de la politique en intégrant la Cour des comptes. Beau lot de consolation pour un subit renoncement après avoir quitté, rappelons-le les Deux Sèvres sous la menace d’une défaite annoncée contre une certaine Ségolène Royale.

La suite est connue, Jean-François Pernin perdit les élections municipales en 2001 au profit de la socialiste Michèle Blumenthal qui n’en demandait pas tant et qui assura la victoire de Delanoe à la mairie de Paris.

Jean François Pernin se représenta au municipales de 2008 contre la liste de droite conduite par Jean Marie Cavada et Christine Lagarde. Il fut éliminé au premier tour obtenant seulement 6,5 % des voix il refusa formellement de soutenir le vainqueur en intégrant sa liste au second tour. Ce fut son dernier acte politique. Il scella la défaite du transfuge du Modem, parti auquel Pernin était resté fidèle. Le Centre avait vécu !

La défaite fut cruelle mais au final, on retiendra que le 12e arrondissement n’était peut-être pas la terre centriste que l’on a voulu nous faire croire, à moins que ce ne fût par procuration avec le résultat que l'on connait aujourd'hui.

J. VITO

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